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Soigner la qualité, réduire la durée et la répétition des pré-roll pour ne pas tuer la poule aux oeufs d’or

La publicité audio digitale se développe fortement et constitue un levier de croissance prometteur pour les radios. Mais c’est aussi une nouvelle source d’agacement pour les auditeurs, surtout pour celles et ceux qui fuient la FM ou les radios commerciales. Quelques mesures simples permettraient de mieux gérer cette ressource.

Les radios commercialisent des messages placés au moment du lancement de l’écoute en ligne d’une radio ; le pre roll. Ces messages peuvent être vendus par la régie ou la radio elle-même mais cet inventaire peut être également commercialisé par plusieurs régies spécialisées dans l’audio digital (Targetspot, Azerion…) mais aussi par les plateformes de streaming et de podcasts (Spotify Advertising, Acast, Ausha…), les agrégateurs (Tune In, Soundcloud…) et des technologies programmatiques (AdsWizz, Triton Digital…).

 

La poule aux œufs d’or

Au final il commence à y avoir du monde sur le marché de la publicité digitale (en progression constante, +53% en France en 2022) et avec de plus en plus d’annonceurs  (+65% en 2022),

 

 

L’audio digital regorge de qualités et d’arguments :

  • Une audience captive. Un spot en pre roll = un contact,
  • Un contexte privilégié. L’auditeur est atteint dans son intimité, avec une attention maximale. Les messages host read (lus par l’animateur du podcast) sont mesurés comme extrêmement efficace en terme d’acceptabilité et de retours.
  • Un environnement préservé. En général, un seul annonceur en pre roll, pas de tunnels de pub.
  • Un hyper ciblage possible (géolocalisation, sexe, âge, CSP, centres d’intérêt…)
  • La publicité dynamique. Le spot peut être différent en fonction de la météo, de la localisation, de l’actualité et bientôt les messages seront personnalisés par individu.
  • L’impact de l’audio. Un contact audio impacte plus les mémoires qu’une impression display, web ou réseaux sociaux
  • La mesure des contacts. Ce que la radio ne peut pas chiffrer, l’audio digital le permet en temps réel (nombre de contacts, durée d’écoute…).
  • Un CPM attractif. Pour les annonceurs qui sont prêts à mettre le prix et pour les éditeurs qui récoltent un bon rendement publicitaire.

 

Les menaces : la cupidité des vendeurs, la négligence des éditeurs et le rejet des auditeurs

Le succès de l’audio digital repose sur un fragile équilibre qui est mis en évidence dans un échange entre les plaintes des auditeurs du service public français et la réponse de la Médiatrice de Radio France, Emmanuelle Daviet, à lire en intégralité ici.

Les auditeurs reprochent à Radio France des publicités en pre roll à chaque lancement du flux, y compris pour les abonnés premium de Deezer (qui paient pour ne pas avoir de pub…), mais aussi des spots en mid roll (au court du programme) et enfin la « bétise sans nom » des messages publicitaires. Certes, ces auditeurs ne sont pas les mêmes qui ceux qui écoutent les radios commerciales, ils ne sont pas « habitués » aux messages pub, ce qui provoque un rejet catégorique de leur part. Mais ce n’est que la pointe de l’iceberg ! Les auditeurs des webradios, des podcasts, du streaming, se sentent agressés par la recrudescence de pre roll à l’ouverture de chaque flux, sans discernement ni respect du contexte d’écoute.

 

La réponse de la Médiatrice de Radio France :

« La publicité digitale sur l’ensemble des leviers (podcast, display, vidéo) reste modérée avec une approche visant à préserver nos utilisateurs des formats les plus intrusifs et à limiter le nombre d’emplacements ou de messages proposés.
Ainsi, Radio France vient de faire le choix de proposer aux annonceurs un emplacement en ouverture des directs écoutés en dehors de son application et de son site web radiofrance.fr. Cet espace reste limité à la fois par le format à 30 secondes, à un seul annonceur par séquence d’écoute et à 3 messages publicitaires par jour maximum. Pour une écoute sans publicité au lancement de votre direct, nous vous invitons à télécharger l’application Radio France« .

 

Comment sauver la poule ?

Si Radio France impose des limites, ce n’est pas le cas de la majorité des autres éditeurs. Mais tous ont des difficultés à contrôler le contenu des messages, qui sont bien souvent très mal ciblés, trop répétitifs et surtout trop longs.

Durée et Contexte

La durée des pre roll, ne devrait pas dépasser 20 secondes, 15 secondes serait parfait, 10 secondes l’idéal, avec les mêmes restrictions que les messages de parrainage/sponsoring (pas de prix).

La contextualisation des messages, améliore l’acceptation de l’auditeur.

C’est possible puisque certains le pratiquent déjà :

NRJ Global Régions limite la durée des pre roll à 20 secondes et impose une donnée contextuelle en début de spot : « Avant de commencer votre programme…. ».

 

L’indé Radio K6FM là Dijon limite le pre roll à 10 secondes en imposant aussi une intro contextuelle « Bonne écoute de votre radio avec…« .

 

 

Ciblage & création publicitaire dynamique

Puisque l’audio digital permet un ciblage relativement pointu il serait opportun d’en faire bon usage. Pour commencer, en ne diffusant pas sur des localisations où l’enseigne n’a pas de point de vente, en évitant de parler un langage d’adolescent à des auditeurs seniors…

Ensuite, lorsque la technologie le permet (et c’est déjà le cas dans certains pays) l’objectif est d’utiliser la pub dynamique, la production de messages différents pour chaque cible (lire notre article de janvier 2022),  l’adaptation automatique du message en fonction de paramètres programmatiques, ce que l’Intelligence Artificielle apporte sur un plateau à l’industrie de l’audio digital et qui va révolutionner la publicité audio (voir notre article sur les Radiodays Europe 2023).

 

 

La répétition, le capping

 

Le capping est un réglage qui permet de déterminer le nombre de diffusions d’un même message auprès d’un même auditeur (en l’occurrence de la même adresse IP) dans une période de temps définie. Le capping est un outil précieux de la publicité digitale qu’il s’agisse de l’audio, de la vidéo ou du display qui échappe aux médias traditionnel. C’est un réglage utile pour les médiaplanneurs qui peuvent agir sur le taux de répétition d’un message sur le même individu ciblé afin d’obtenir soit une exposition intense (pour une promo à court terme ou dans le cas d’une campagne mono media par exemple), soit au contraire peu de répétition (parce qu’une écoute du message est suffisante ou parce que la campagne est également déployée sur d’autres médias qui visent la même cible….).

En résumé, un capping (plafonnement en anglais) réglé sur 1 (par jour) = le message ne sera entendu qu’une seule fois dans la journée par l’auditeur. Un capping réglé sur 6 = la possibilité d’entendre 6 fois le même message dans la même journée.

La durée du réglage du capping est aussi un élément à modérer. Car si un même auditeur entend le même message, ne serait-ce qu’un fois par jour, à chaque lancement de sa radio préféré durant plusieurs jours, l’effet de saturation arrivera très vite, surtout compte tenu du fait qu’il n’y a qu’un message et que l’environnement privilégié le rend particulièrement percutant et facile à mémoriser.

En théorie, cette limitation vise à éviter la sur-sollicitation de l’utilisateur et à améliorer l’expérience de l’auditeur. Mais dans la réalité, les vendeurs « chargent » la campagne, car avec un capping de 1 il sera difficile de déployer le nombre d’impressions vendues à l’annonceur dans la durée de la campagne, surtout si les critères de ciblage réduisent le nombre d’écoutes. C’est pour cela que le capping est souvent réglé sur 6 ou 8 voir même pas limité du tout, ce qui au final agace les auditeurs qui entendent le même spot à chaque lancement de la radio ou à chaque ouverture d’un flux du même groupe de radio ou de podcasts…

En médiaplanning, il est d’usage de chercher à atteindre :

  • un taux de répétition de 8, sur un même individu, pour un lancement, une nouveauté ou une campagne mono media.
  • un taux de 4 ou 5 contacts, sur un même individu, lorsque l’enseigne est connue, qu’elle communique régulièrement ou que la campagne est aussi déployée sur d’autres médias et supports qui vont atteindre les mêmes individus et donc cumuler les points contacts au final.

 

 

 

Durant une même campagne, la diffusion de messages créatifs différents, respectueux de l’auditeur, ciblés de manière pertinente, tenant compte du contexte d’écoute (de l’heure, de l’appareil utillisé…) peut permettre d’éviter le rejet malgré une répétition, une fréquence élevée, voire même de constituer un effet whaou ou simplement une bonne acceptation par l’auditeur.

En résumé, la poule aux œufs d’or pourrait produire un rendement juteux  et durable, pour autant que les différents acteurs utilisent à bon escient les avantages et la créativité de l’audio, combinés aux atouts du digital, en respect de la qualité de l’expérience utilisateur.

 

Michel Colin
Mediatic Conseils